Figer une pensée en développement
Table des matières
Continuité
Déjà décembre. Derniers mois passés fissa. La tête dans le guidon éditorial et productif.
Relire, améliorer, organiser, rendre accessible, écrire, recommencer.
Décembre encore, dans ce premier trimestre qui s’achèvera ensuite, d’écriture en semaines libres et presque à plein temps.
Pas d’éditorial en octobre ni en novembre pourtant. Je n’ai pas pris le temps alors de signaler mon activité, de communiquer sur elle.
Cette fois, je m’y colle.
Cinq jours sur sept pour m’essayer à l’écriture, pour me concentrer, pour développer, pour mettre de l’ordre dans mes idées et en coucher de nouvelles sur le papier. C’est parfait. Sauf que je me submerge en m’immergeant et que je ne réussis que rarement à faire de la publication une respiration.
Or, cette catégorie des éditoriaux est prévue pour me permettre de faire le point sur le site plutôt que sur mon activité d’écriture. Pourtant, d’elle dépend le site.
En vérité, depuis peu, je ressens le besoin de partager non plus seulement le fruit de mon travail, mais aussi son élaboration.
Jour après jour
Car ce que je publie n’est qu’une infime partie de ma production globale. Le reste m’occupe chaque jour. Cette partie cachée de l’iceberg, je ne cesse de la reformuler, de l’étendre et du coup, de chercher de meilleurs moyens pour me la mettre en tête et dans l’œil. Cette masse que j’oublie ou dépasse donc malgré moi, me sert – ou devrait me servir – de base de travail. Elle concrétise ma progression et me permet notamment de considérer mon activité comme saine et viable – ce que l’exercice du site ne permet pas encore, et qui n’a quoi qu’il en soit rien d’évident pour mon entourage, par ailleurs patient, voire (aveuglément) confiant.
Souvent, pourtant, cette quantité m’effraie ou me repousse, et malheureusement, personne d’autre que moi ne sait rien ni de l’existence de cette somme (et donc de son éventuelle qualité) ni de ce combat quotidien que je mène avec elle et pour ne pas en faire un ennemi. Le genre d’ennemi qu’on est tenté de dissiper d’une simple suppression informatique. Vous savez, cet acte salvateur parce qu’irrémédiable, qui consiste à effacer d’un clic tout un pan d’une existence numérique dans laquelle on s’était investi : un réseau social devenu envahissant, voire prépondérant, un blog, des photos qui rappellent trop de choses, des fichiers trop encombrants…
Je ne me vois pas considérer, ne serait-ce qu’un jour dans le futur, mon activité d’écriture comme une marotte appartenant au passé et dont il faudrait que je me déleste, mais nombre de mes textes appartiennent, eux, bel et bien à ce passé et devraient y rester, quand je souhaite encore, au fond de moi, en tirer quelque chose et si possible le meilleur. C’est par exemple du côté de cette ambivalence que je lutte : certains écrits méritent d’être ressuscités et présentés, d’autres ne sont plus, au mieux, qu’un outil pour me souvenir.
Il faudra se décider.
Labeur
Je tirerais probablement 2 bénéfices au moins à communiquer sur cette démarche, sur ce labeur : j’impliquerais ce lecteur – qui reste potentiel et sur lequel je mise de moins en moins, certes – et j’obtiendrais, peut-être, des retours et des conseils en rapport à mes questionnements.
Pourquoi hésiter alors ?
Eh bien, je ne sais pas comment en parler. Je ne suis même pas sûr d’être capable de concrétiser et synthétiser, ne serait-ce qu’à l’occasion, ce cheminement quotidien.
C’est-à-dire que j’envisage ce support qu’est terhemis.fr comme celui de la publication de mes trouvailles ou de mes réussites, des écrits qui, même s’ils ne mettent pas le doigt sur une réponse ultime ou définitive, me donnent l’impression d’avancer. Comment alors, et où, ou plutôt par quelle perspective, dévoiler ce qui est de l’ordre du piétinement et qui a parfois tout autant d’importance ?
Systématiquement, tandis que je quitte épuisé l’éventuelle prise de recul que j’ai tenté d’opérer, je me dis que j’aimerais être capable de la faire savoir, mais ne m’en sens plus la force.
Je ne suis pas assez clair.
Disons que ces recherches que je mène, sur tous les fronts que je peux rencontrer, m’emmènent vers plus de questions et nécessitent de chercher davantage et encore, si bien que je trouve difficilement le moment de m’arrêter, et encore moins l’interstice pour déployer vers l’autre mon avancement.
C’est heureux, de ne pas voir le bout d’un questionnement. C’est une liberté, une richesse qu’offre l’existence qui m’anime autant qu’elle me perturbe, mais pour ce qui est de l’échange, de cette communication qui serait, j’en suis sûr, bénéfique, c’est un calvaire. Je m’enfonce dans mon calvaire autant que je m’élève vers de nouvelles pistes et de nouveaux possibles. Je parviens mal à dire au lieu de réfléchir ou d’écrire.
Il existe forcément des solutions, mais comme cet éditorial prévu (et presque prêt) pour le premier décembre, n’en finissait pas de muter, j’ai décidé de le scinder en plusieurs parties qui poindront peu à peu durant le mois.
Le fait de produire et d’envisager un éditorial sur une période plutôt qu’à un instant précis constitue déjà une réponse (une première, qui peut-être ne sera jamais renouvelée), à cette tournure que j’ai besoin que ces éditoriaux prennent : plus récurrents, plus divers et mieux en prise avec ma progression.
Changement
Malgré les quelques publications mensuelles seulement qui pointent ici, il y a donc une continuité quotidienne à mon écriture, et il m’apparaît que je devrais la mettre en avant elle aussi. Ma problématique à l’heure actuelle se résume peut-être à ceci : chercher est une chose, aboutir un écrit en est une autre. Il me faut donc envisager un nouveau virage dans mes méthodes de travail et intégrer l’influence de la communication sur mon labeur.
Quelles seraient les solutions pour produire et communiquer en parallèle, si ce n’est en même temps ?
Dévoiler (l’ébauche)
Je pourrais publier mes recherches telles quelles, sans les raccorder ou en donner la cohérence temporelle, mais leur teneur serait ainsi davantage diluée : elles sont déjà pour moi des instants que j’ai du mal à rattraper, elles apparaîtraient certainement absconses et futiles à un tiers. C’est pourquoi je reste convaincu qu’un travail supplémentaire de médiation et de mise en situation s’impose, et c’est ce supplément que je peine à mettre en œuvre. Voilà par où je manque de redéployer ma production, quand l’écriture mêlée à la réflexion est débordée par cette nécessité de communiquer et d’installer des repères.
Il est évident que ces repères destinés au lecteur me deviendraient une aide précieuse au moment de reprendre le fil de la réflexion, des semaines voire des mois plus tard – chose qui m’est justement difficile. Je me disperse, c’est un fait, je le sais et j’ai décidé de l’assumer et de profiter de ce que ça m’offrait de renouvellement. Le problème tient dans ce que ces repères sont un atout pour le moi du futur devenu lecteur extérieur à la réflexion, mais sont un frein pour le moi du présent qui ne veut qu’avancer le plus loin et le plus vite possible.
Quoi qu’il en soit, montrer ces recherches, ces idées, ces germes de réflexion, ces notes ou ces remarques ou ces morceaux de scénario… dans leur état brut, ne conviendrait pas à mon critère premier pour autoriser la publication : que mes textes soient aboutis au moins du point de vue langagier.
D’une certaine manière, ce vivier de propos que je grossis jour après jour ne peut donc que rester privé. D’un côté, je me perds probablement en voulant sprinter dans cette course de fond, de l’autre, ce n’est qu’en continuant sans cesse que je réussirai effectivement à transformer ces ébauches déconnectées en matière logique et agréable à parcourir.
Rêver (un collectif)
Reste que je me sens seul dans ma démarche comme sur internet. C’est un bon point quand je remarque la propension à reproduire qui y règne, mais ça pèse aussi sur ma capacité, ou plutôt mon envie, de production.
Je n’ai pas abandonné l’espoir de trouver non pas seulement des lecteurs, mais des pairs de pensée, d’expression, voire d’écriture.
A même surgi l’idée d’un collectif, qui m’associerait à quelques-uns d’entre eux et grâce auquel le débat serein prendrait une tournure vivante, et surtout interactive. Cette discussion serait permanente et personne ne chercherait à y imposer de point de vue. Ce serait au contraire le travail de ces points de vue, la manœuvre de ces pensées sans cesse probantes mais divergentes, qui nous connecteraient et nous pousseraient à faire et à mieux faire.
Je rêve de pouvoir me lever de mon siège après plusieurs heures de travail solitaire et de concentration intense pour échanger avec d’autres, présents, réels, dont les voix me pénètrent par les oreilles plutôt qu’apparaissent depuis ce fond de moi que je ne sais toujours pas situer. Je n’aurais qu’à me retourner pour profiter, quand je le désirerais, de cet espace ouvert et commun dans lequel fuseraient les notions. Je pourrais me perdre avec eux dans de nouvelles hypothèses, de nouvelles pistes de renouveau, et débuter de les emprunter jusqu’à ce que la fatigue les occulte dans un nouveau sommeil et un nouvel oubli. Mon lit resterait comme il est présentement, juste à côté.
Je parlais de remise à zéro informatique dans la première partie, ces nuits en sont une autre, biologique. Pour le meilleur quand il s’agit de reléguer au rang qu’elles méritent les angoisses et les peurs, et pour le pire quand elles emportent avec l’eau stagnante celles vives d’une réflexion toujours plus prégnante.
Magnifique utopie… qui ne m’ancre qu’un peu plus dans la réalité… avec laquelle je dois donc composer !
Nous verrons comment dans la prochaine partie.
Réseau
J’ai donc un beau bordel à gérer. Très bien. J’aimerais pouvoir rencontrer d’autres énergumènes à bordel et même échanger sur cette gestion. Plus compliqué. Raison de plus pour s’armer de patience et d’outils et continuer de chercher.
Pour ce faire, j’arpente. J’arpente, à l’occasion, mais avec détermination, ces centres supposés d’échange, ces collectivités, ces réseaux virtuels de notre époque. Pas tant pour ce qu’ils sont, mais parce qu’ils devraient me permettre d’accéder aux contenus forgés par ceux qui s’y installent, à tort ou à raison. La lumière sera-t-elle au bout du tunnel ?
Piailler
J’évoquais Twitter dans de précédents éditoriaux, d’abord pour annoncer mon implication, plus tard en expliquant avoir abandonné ce dernier bastion pour moi de relationnel numérique. Du début à la fin de cette expérience, j’éprouvais une réticence à m’insérer dans ce traitement mécanique et trop concis de l’information. Ce qui, au vu de la longueur de cet éditorial, n’a finalement rien d’étonnant.
La plupart des personnes, ou des personnalités, qui exploitent ce biais de communication ne le font que pour répercuter des liens vers leur site. Jamais les connexions établies là ne m’ont permis d’échanger avec quelqu’un. Si je dois me casser l’œil sur un langage spécifique et plein de dièses et d’arobases pour seulement trouver et donner des liens et à peine quelques impressions, je préfère me limiter aux flux de syndication qui remplissent très bien cet office.
Divulguer
Je ne vais pas développer ici mon incompatibilité avec les réseaux sociaux numériques, mais je dois admettre une certaine perplexité. Facebook m’apparaît comme un vrac d’informations privées et publiques, personnelles et professionnelles, et montre cet ensemble dans un désordre et une mixité qui me sont désagréables. La compagnie de Zuckerberg, comme celle des autres, ne cherche qu’une chose : développer ce flux constant qui captera l’utilisateur client pour ne le relâcher que le plus tard possible, après l’avoir bien engraissé de messages publicitaires.
Google Plus est tout aussi généraliste, mais d’autant plus froid qu’il essaye d’organiser et de segmenter tout en faisant des ponts aux allures de grands écarts. Une recherche d’exhaustivité qui diffuse un peu trop la raison d’être de la chose, à savoir concurrencer un autre géant, certes, mais surtout récolter encore et toujours plus de données personnelles.
Linked In est aussi vide qu’il est spécialisé quand Youtube, génial outil, me semble peuplé de gremlins et de trolls. C’est un peu le problème du web dans son ensemble, malheureusement.
S’inspirer
C’est dans ce contexte mortifère qu’une amie m’a déclaré qu’il devait bien y avoir des gens de la lettre sur Tumblr. Je ne l’ai pas fait tout de suite, mais j’ai cherché. Et effectivement, il y en a. L’ambiance là ne me repousse pas, cette fois. Au contraire. On sent que le service laisse beaucoup de libertés et chacun en fait bon usage.
Tumblr est autant un réseau social qu’un outil de publication simplifiée, si bien que les utilisateurs essayent d’avoir quelque chose à dire ou à montrer. Outre des collectionneurs, quelques créateurs semblent s’y être faits leur place.
En alliant communauté et publication (et pas simplement partage comme le proposent les précédents services), Tumblr trouve un juste-milieu pertinent. On peut s’y dévoiler, à sa manière, on peut suivre d’autres personnes qui font de même, et l’échange est possible grâce à un système de questions directes ou par la re-publication commentée (qui remplace, si j’ai bien compris, le système de commentaires).
J’ai donc ouvert en ce début de mois un pêle-mêle accessible à l’adresse http://terhemis.tumblr.com : un site compagnon pour terhemis.fr, qui me servira à partager ce que j’aime et mes inspirations sans m’obliger à produire pour cela un écrit abouti, et à me faire connaître. Je ne suis qu’au début de cette nouvelle approche, mais j’ai bon espoir que ce soit plus probant cette fois, sachant que j’aime déjà et simplement consulter les pages des autres utilisateurs…
Dire ici, sur mon propre site
Tout ça, c’est bien beau, et Tumblr fera une bonne porte d’entrée vers terhemis.fr, mais dois-je y réserver ma communication et mes errements ? Probablement pas. Ce pêle-mêle n’est qu’un moyen d’établir le contact et j’ai bien conscience que le meilleur moyen / la solution pour accéder à une plus large audience serait de m’insérer dans chaque communauté et de profiter des atouts de chaque service, mais je dois encore me décider à ne le faire que de façon automatique, puisque je ne peux pas être partout en même temps. Cet automatisme me freine et je reste sceptique quant à l’efficacité sur le long terme d’un tel déploiement tous azimuts. J’écrivais d’ailleurs dans mon manifeste avoir tiré un trait sur cette méthode, mais j’avoue l’envisager à nouveau, ou en tout cas, envisager certaines pistes.
Le plus simple pour communiquer reste donc de le faire dans des éditoriaux qui traitent, comme ici, de l’au-delà de la vie du site et touchent à la réflexion. Remaniés pour la nécessité de cette communication sur mon périple, ils pourraient être plus nombreux, et ce ne serait que leur écho que je transmettrais ailleurs…
Je n’ai, jusqu’ici, pas été très précis à propos de ces errements dont je dis vouloir parler. Je tenterai d’être plus spécifique dans la prochaine partie.